Mon chat fidèle n’a pas cessé ses manœuvres de préparation à l’hiver.
Je vous raconte l’aventure, comme si vous étiez présent en lisant ces lignes.
Round numéro un. La journée même, il demande la porte et revient en vitesse dans la maison en triomphe, une hermine vivante dans la gueule.
J’arrive à le coincer et à prendre la petite fouine par la peau du cou. Je la sors dehors illico et la pose sur le balcon, pendant qu’Arthur beugle sa rage de l’autre côté de la porte. C’est Mimime notre hermine !
J’espère que cette mangeuse de souris s’en sortira, il n’y a jamais trop de prédateurs dans le coin. Je la dépose dans le haut des marches et cligne des yeux. La seconde suivante, elle a disparu. Une de réchappée !
Ouf. J’imagine le cauchemar d’essayer de rattraper cette fusée dans ma cuisine.
Le chasseur est frustré. Je l’empêche de sortir pendant quelques heures. Il se venge en déroulant l’entièreté du rouleau de papier de toilette pendant que je vaque à mes conserves. Une première ! Je rigole. Déchiqueter les rideaux m’aurait un peu plus offensée.
Mais…
Round numéro deux. Du moment que je le laisse sortir, il repart en mission carnassière. Il s’enfile dans la craque de la porte dès que je lui ouvre, un tamia rayé dans la gueule. C’est un bébé avec une belle fourrure qu’on dirait de velours.
Mon félin est plus malin, il esquive mes tentatives pour lui enlever.
Il court dans un coin et libère sa proie, toujours en vie.
La partie débute.
Le petit suisse prend l’allure d’un mini kangourou et sautille sur place, les poings levés, en poussant des petits cris de guerre. Arthur est F.A.S.C.I.N.É. Il donne un coup de patte et recule. Le rongeur en profite pour fuir et se cacher sous le divan. Je suis rouge arbitre et j’ordonne à mon matou de le rattraper. Je soulève rapidement le meuble de salon. Arthur se faufile en dessous. Les deux tournent en rond, comme dans un ring imaginaire, le chat développant rapidement une technique de boxe efficace en lançant des uppercuts des deux côtés, de façon à garder l’adversaire dans le centre.
Il adooooooore ce jeu. Moi, beaucoup moins.
Je continue de tenir mon divan dans les airs en sommant mon matou de sortir de là. Il semble que mes cris — qui passent pour un encouragement de la foule — excitent encore plus le boxeur amateur.
— Arthuro Ghetti, suffit !
La partie s’éternise.
J’ai tellement mal au bras que je songe à laisser tomber ce toit du stade improvisé pour régler instantanément le sort des deux sportifs de salon.
Boum.
Game over.
J’y songe…
Le petit joueur avec le maillot rayé réussit finalement à contourner le gros avec le maillot orange. Il file comme une balle sur le plancher et saute se cacher dans un panier qui contient des revues.
C’EST LE BUT !!!!
Je tire un coussin sur le panier pour en faire une cage improvisée, que je sors dehors en courant. Je claque la porte au nez du perdant qui braille. Quand je rentre, le tamia est en sécurité dans un arbre, et s’il ne meurt pas d’un arrêt du cœur dans la prochaine heure, il aura une longue vie de sportif prudent.
Je pointe maintenant le doigt sur mon chat, assis sur le banc des punitions :
LES PARTIES DANS LA MAISON, C’EST NON !
L’arbitre vient de parler.
Plus tard, on aura une longue séance de réconciliation dans le filet, je veux dire le hamac. Trêve générale. On se serre la patte, mon doigt dans ses coussinets. La vraie victoire, c’est de s’avoir l’un l’autre. Couché sur moi, Arthur se lave. Mon boxeur bien léché.
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